animée par Christian Ciocca, journaliste et producteur, RSR Espace 2

16h.15-17h.15

Retour au programme de la Rencontre

radiotous244La table ronde avec la participation de l’auditoire a réuni Marie-Louise Goumaz, Jean- François Gottraux et Fanny Charmey, de l’Association des amis du Patois vaudois, Norbert Furrer, chargé de cours aux Universités de Berne et de Lausanne, et Gilbert Coutaz, président de RéseauPatrimoineS.

 

L’attrait pour le patois

Marie-Louis Goumaz (appelée en patois « Le Goume ») s’est intéressée au patois au travers de Jeanne Décosterd, épouse du patoisant Albert Chessex, dont elle a été une familière, en suivant des cours et en participant à des conférences. Le fait de pouvoir partager la connaissance du patois avec d’autres lui a permis de nouer des contacts approfondis et authentiques. Elle n’a pas l’impression d’être une nostalgique en défendant le patois et en se préoccupant de sa transmission.

Fanny Charmey, étudiante en dialectologie, s’est intéressée au patois par l’intermédiaire de la toponymie qui renvoie très souvent dans le canton de Vaud, à des vocables empruntés au patois.

Jean-François Gottraux qui a lancé, avec Jacques Mounir, le site de l’Association des Amis du patois vaudois (www.patoisvaudois.ch) et qui en assure la maintenance et le développement, représente l’avenir. En recourant aux nouvelles technologies, il a constitué de nombreuses archives sonores avec de nombreux patoisants, rassemblé des textes, des disques et des cassettes audio. En maîtrisant le patois, on pénètre mieux l’histoire d’une région, on a une meilleure connaissance des habitants.

 

Le patois dans son contexte général

Du point de vue linguistique, toutes les langues se valent, elles traduisent des interprétations de concepts, des lectures de la vie, etc. Du point de vue socio-linguistique, les dialectes ne sont pas soumis, à la différence des langues officielles, à la pression des normes, ils s’apprennent directement de la bouche des parents, se combinent et s’adaptent aisément aux nouvelles situations. En raison de la charge normative de la langue, les utilisateurs ont l’impression de parler plus ou moins fautivement une langue, une langue pure. Les patois de Suisse romande présentent le handicap de leur intercompréhension, leur distance par rapport à la langue majoritaire, ce que les dialectes de Suisse allemande connaissent dans une moindre mesure. La situation des patois de Suisse romande est spécifique en Suisse.

 

L’importance de la musicalité de la langue

Tout le monde est d’accord pour constater l’importance des différences entre l’approche par les textes et celle par le son des patois. Le souci est vraiment de rassembler les témoignages du plus grand nombre de locuteurs, de faire jouer des pièces de théâtre et interpréter des saynètes.

 

La transmission

Selon Marie- Louise Goumaz, « nous avons fait tout notre possible pour maintenir le patois. Nous aurions certainement pu faire plus en osant faire sortir le patois de ses cachettes. Il faut rendre hommage à ceux qui, par le passé, l'ont choyé et à tous ceux qui, aujourd'hui se dévouent sans compter pour le faire connaître et l'apprécier. Le patois vaudois se porte mieux aujourd'hui qu'il y a 40 ans grâce aux cours bien suivis dispensés depuis 20 ans. L'édition d'une grammaire (Le Patois vaudois de Jules Reymond et Maurice Bossard 1979, réédité en 1981) et du Dictionnaire du patois vaudois de Frédéric Duboux-Genton (1981, également réédité en 2006) ont grandement facilité l'approche du patois. La relève est là, prête à utiliser les nouveaux moyens de communication pour assurer la survie de ce parler qui nous est cher. Faisons confiance à la jeune génération et restons vigilants aux côtés de ces jeunes pleins d'enthousiasme. »

radiofurrercioccacharmey249Longtemps déconsidéré et confiné dans un ghetto, le patois doit continuer à travers la pratique. M. Furrer fait le constat que 96% de la population mondiale parle 4% des langues, sur les 6800 recensées. La dégradation des langues est constatée partout, il sera difficile de défendre la glottodiversité, dans la mesure où la moitié des langues est menacée d’extinction. Les dialectologues considèrent le matériau dialectal comme un matériau vivant, « il ne risque pas de mourir au niveau scientifique », selon Mme Charmey. La démarche de RéseauPatrimoines, selon M. Coutaz, est de rapprocher les acteurs et les exploitants du patois, de réunir les conditions favorables à la collecte des informations sur le patrimoine immatériel – le Glossaire des patois de la Suisse romande, créé en mars 1899, poursuit une démarche pluridialectale et prend en compte la profondeur historique de la langue. Il est important de garder le plus possible de clefs pour comprendre le contenu des langues et pour permettre qu’elles continuent à témoigner, même si elles ne sont plus pratiquées. Au moment où un avant-projet sur le patrimoine mobilier et immatériel est mis en consultation publique, il est important d’intéresser les autorités politiques aux défis conservatoires du patrimoine. Il faut des relais, des intercesseurs et des intermédiaires. RéseauPatrimoineS a pour mission de décloisonner les patrimoines et de créer les contacts entre les patrimoines.

Retour au programme de la Rencontre